Dans le calendrier républicain français, le 1er jour du mois de fructidor, souvent notre 18 août, était dénommé jour de la prune.
La prune désigne évidemment le fruit (reine-claude, prune d’Agen, mirabelle, quetsche…), mais également l’eau-de-vie obtenue par sa distillation.
C’est l’usage qu’en fait Zola dans L’Assommoir.
Dès le chapitre 2, pour mieux courtiser Gervaise, Coupeau l’invite au cabaret éponyme du père Colombe et ils y « mang[ent] ensemble une prune ». À ce stade du récit, elle affirme que « c’est vilain de boire » et s’en abstient :
« – Tenez, ajouta-t-elle en montrant son verre, j’ai mangé ma prune ; seulement, je laisserai la sauce, parce que ça me ferait du mal.
Coupeau, lui aussi, ne comprenait pas qu’on pût avaler de pleins verres d’eau-de-vie. Une prune par-ci par-là, ça n’était pas mauvais. Quant au vitriol, à l’absinthe et aux autres cochonneries, bonsoir ! il n’en fallait pas. »
Malheureusement, leurs bonnes résolutions ne dureront qu’un temps et la déchéance dans l’alcoolisme sera terrible.
Toujours est-il que, comme pour Nana, je me suis toujours imaginé Gervaise sous les traits d’un modèle de Manet, celui du tableau justement intitulé « La Prune », contemporain du roman (1877) :
J’ai eu la chance de voir ce tableau, conservé à Washington, lors de la récente exposition « Manet / Degas » au musée d’Orsay et j’y ai retrouvé ce « joli visage de blonde [à la] transparence laiteuse de fine porcelaine », avec, déjà, le regard perdu dans le vague :
En cette fin d’été, le fruit est délicieux, gorgé de soleil et sucré à souhait : il mérite d’être dégusté tel quel ou envoyé en carte buissonnière !
Ping : Chardin et la pruine - La carte buissonnière