Avant de devenir la fleur des tombes, le chrysanthème eut son heure de gloire dans le salon des élégantes.
C’est ainsi qu’Odette de Crécy n’est pas seulement la dame aux catleyas. À plusieurs reprises, le narrateur de La Recherche s’attarde sur ses chrysanthèmes, notamment dans ce très beau passage :
« Mais j’étais touché par ce que ces chrysanthèmes avaient moins d’éphémère que de relativement durable par rapport à ces tons, aussi roses ou aussi cuivrés, que le soleil couché exalte si somptueusement dans la brume des fins d’après-midi de novembre et qu’après les avoir aperçus avant que j’entrasse chez Mme Swann, s’éteignant dans le ciel, je retrouvais prolongés, transposés dans la palette enflammée des fleurs. Comme des feux arrachés par un grand coloriste à l’instabilité de l’atmosphère et du soleil, afin qu’ils vinssent orner une demeure humaine, ils m’invitaient, ces chrysanthèmes, et malgré toute ma tristesse à goûter avidement pendant cette heure du thé les plaisirs si courts de novembre dont ils faisaient flamboyer près de moi la splendeur intime et mystérieuse. »
Proust, À l’ombre des jeunes filles en fleurs
Mes cartes buissonnières rendent hommage à cette ambiance rose et cuivrée, avec un superbe papier washi à motifs de kiku (chrysanthème) :