Usagi (兎) signifie lapin.
Lapin lunaire
Selon une légende d’origine indienne, un jour, un dieu descendit sur terre sous les traits d’un vieillard. Affamé, il demanda un repas à plusieurs animaux. Ils lui rapportèrent tous quelque chose sauf le lapin, qui ne savait pas chasser. Il se jeta alors dans le feu pour s’offrir en sacrifice. Très touché par son geste, le dieu le ramena à la vie et l’envoya sur la lune pour que chacun puisse le voir et se souvenir.
Lorsque la lune est pleine, les Japonais aiment ainsi à y distinguer la silhouette d’un lapin battant le riz pour fabriquer des mochi ; sans doute parce que la pleine lune se dit mochitsuki.
À partir d’une photo prise depuis mon balcon parisien lors de la pleine lune de printemps du 16 avril 2022, je vous ai dessiné la silhouette de ce fameux « lapin de la lune » (月の兎, tsuki no usagi) :
On le retrouve sur cette garde de sabre (tsuba) et sur cette petite sculpture servant à maintenir le cordon de tout objet pendu à la ceinture du kimono (netsuke) :
Dans l’art japonais, le lapin est donc souvent associé à la lune, comme dans cette estampe pour éventail de Hiroshige :
Mais il peut également s’avérer purement décoratif, sur un éventail de Tamagawa Shucho ou un kimono de Chôbunsai Eishi :
Il en est de même pour ces remarquables brûle-parfums de la collection Cernuschi du début du XIXe siècle :
Ces bronzes n’ont pas échappé à l’attention d’Émile Reiber, directeur artistique de la maison Christofle, qui les reproduit dans un album destiné aux artisans et créateurs :
Lapin des neiges
À l’époque Edo (1603-1868), les enfants se divertissaient en hiver en confectionnant des sculptures de neige, notamment des lapins des neiges (yuki usagi).
Vers 1780, Isoda Koryûsai représente ainsi une femme qui peint les yeux d’un lapin des neiges posé sur un plateau en laque tenu par un petit garçon :
En 1867, année du Lapin, Yabu Chosui en fait le sujet de deux surinomo, ces cartes luxueuses mêlant estampe et poème que l’on offrait à l’occasion du Nouvel An.
Le premier est un lapin lunaire, rond comme une pleine lune ; le second, gaufré, est un lapin des neiges sur son plateau de laque noire sur fond de fleurs de prunier (ume) :
De nos jours, grands et petits réalisent toujours des lapins à partir de boules de neige auxquelles ils ajoutent des baies rouges pour les yeux et de longues feuilles vertes pour les oreilles. Ils peuvent également déguster des manjû en forme de lapin (petits gâteaux ronds et blancs préparés avec de la pâte de haricots rouges) :
Et ce sont également des yuki usagi qui ornent mes cartes buissonnières :
Sources :
« Le lapin : une icône du bestiaire japonais »
« Lapin lunaire » – fiche Wikipédia