Sous le signe de l’hellébore

Dans le calendrier républicain français, le 11e jour du mois de pluviôse, souvent notre 30 janvier, était dénommé jour de l’ellébore.

« Chez nous, et un peu partout, on l’appelle Rose de Noël. Mais elle ne ressemble pas à la rose, pas même à la petite églantine émue et rougissante » : c’est ainsi que Colette ouvre le chapitre de Pour un herbier intitulé « Ellébore ».

Certaines espèces d’hellébores, ou ellébores, fleurissent en hiver, d’où ce joli surnom de « roses de Noël ». Il s’agit notamment de l’Hellébore noir (Helleborus niger) et de l’Hellébore d’Orient (Helleborus orientalis).

Je le constate avec bonheur sur mon petit bout de balcon parisien :

Longtemps on a prêté à l’hellébore la faculté de guérir la folie. On trouve trace de cette croyance dans une des fables de La Fontaine les plus connues, « Le lièvre et la tortue ». Le lièvre se moque ainsi de la tortue qui prétend le vaincre à la course :

« Ma Commère, il vous faut purger
Avec quatre grains d’ellébore. »

La beauté de ses fleurs a inspiré les artistes, en particulier ceux de l’Art nouveau. Eugène Grasset en illustre ainsi le mois de décembre de son calendrier pour le magasin de confection La Belle Jardinière en 1896, tandis qu’Elisabeth Sonrel en accompagne son allégorie de l’Hiver en 1901 :

Plus proche de nous, l’artiste plasticienne Valérie Belin interroge « la codification de la beauté féminine dans les années 50 » dans sa série Black-Eyed Susan (2010), qui comprend « Christmas Rose (Helleborus Niger) » :

Pour terminer cette flânerie sous le signe de l’hellébore, les mots sensuels de Colette :
« Promises, inattendues, précieuses, prosternées mais bien vivantes, les ellébores hivernent. Tant que la neige les charge, elles restent fermées, ovoïdes, et sur l’extérieur de chaque pétale bombé une trace vaguement rosée, semble seule indiquer qu’elles respirent. Le robuste feuillage en étoile, la raideur des tiges, autant de caractères par lesquels toute la plante proclame sa persistance émouvante. Cueillie, ses coquillages sensibles desserreront leurs joints à la tiédeur d’une chambre, délivrant la houppe des étamines jaunes, heureuses de vivre et de diverger… Ellébore ! »

Motif emprunté à George Auriol

Sources :

« Décembre au Jardin : les roses de Noël » – Calendrier floral du Jardin des Plantes 

« La rose de Noël » – Herbier de Gallica

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