Dans le calendrier républicain français, le 9e jour du mois de thermidor, souvent notre 27 juillet, était dénommé jour de la mûre.
Ovide nous apprend l’origine de sa couleur sombre, comme il explique la naissance de l’anémone ou de l’hyacinthe.
Dans le chapitre IV des Métamorphoses, il narre les amours de Pyrame et Thisbé.
Ces jeunes Babyloniens, habitant des maisons contiguës, étaient passionnément épris l’un de l’autre, mais leurs pères s’opposaient à leur mariage. Cette trame sera également celle de Roméo et Juliette, avec un destin tout aussi tragique…
Dans un premier temps, les amants profitent d’une fissure dans le mur de leurs maisons pour se parler, comme on les voit, en haut, sur cette belle enluminure du XIIIe siècle :
Puis ils décident de s’enfuir et se donnent rendez-vous sous un haut mûrier chargé de fruits blancs comme la neige (« arbor ibi niueis uberrima pomis, / ardua morus »).
Il s’ensuit un terrible quiproquo. Thisbé arrive la première et aperçoit une lionne la gueule ensanglantée de son dernier repas. En s’enfuyant, elle laisse choir le voile qui couvrait ses épaules.
Quand Pyrame parvient au lieu-dit, il trouve le voile taché de sang. Persuadé de la mort de sa bien-aimée, il plonge son arme dans son sein, arrosant de pourpre les fruits du mûrier (« purpureo tinguit pendentia mora colore »).
Lorsque Thisbé revient sur ses pas, elle saisit l’arme et se tue à son tour, après avoir imploré le mûrier d’abriter leurs corps et de conserver la marque de leur terrible destin en portant toujours des fruits témoignages d’un double et sanglant sacrifice (« gemini monimenta cruoris »). C’est ce moment que saisit Pierre-Claude Gautherot dans une toile datant de 1799 :
Ovide excelle à sceller le destin funeste d’amants contrariés dont le sang colore à jamais fleurs ou fruits.
Pour autant, la mûre demeure avant tout pour moi ce fruit que j’ai plaisir à cueillir à même le roncier, à déguster en confiture et à illustrer en carte buissonnière !
