Après les motifs géométriques, ceux d’arbres, de plantes et de fleurs et ceux d’animaux, explorons les objets japonais récurrents.
Commençons par un motif si fréquent que je suis certaine que vous l’associez au Japon.
Il s’agit de wagasa (和傘), les ombrelles traditionnelles en bambou et papier huilé.

Originaires de Chine, elles ont d’abord servi aux membres de la famille impériale et aux aristocrates pour se protéger de la lumière du soleil et des esprits maléfiques, avant de se faire également parapluies.
Durant la période Edo (1603-1868), la production se transforme en un processus artisanal et l’ombrelle devient populaire dans tous les milieux.
Utagawa Sadahide nous montre ainsi une femme occupée à fabriquer une ombrelle en appliquant de la colle à l’aide d’un pinceau :

Accessoire de mode
L’ombrelle devient un accessoire de mode pour ces courtisanes saisies par Hokusai admirant les cerisiers en fleur :

Ces jeunes femmes de la fin du XIXe siècle arborent fièrement la leur sur ces photographies :


Contrairement à nos traditions occidentales, l’ombrelle n’est pas spécifiquement féminine et les hommes l’utilisent volontiers :


Sur ce surimono, Totoya Hokkei nous montre Ono no Tofu :

Ayant manqué une promotion à la cour impériale, ce calligraphe du Xe siècle songe à renoncer. Un jour, en quittant le palais, il aperçoit une grenouille qui tente de s’élever jusqu’à la branche d’un saule. Il la voit sauter sept fois, échouer sept fois, puis réussir au huitième essai Il reprend alors courage et entame une illustre carrière qui servit ensuite d’exemple pour les écoliers apprenant à écrire.
Par tous les temps
Imperméabilisées grâce à des cires et des huiles végétales, les ombrelles se font également parapluies :


Sur cette estampe d’Utagawa Kuniyoshi, on peut mesurer la force d’une averse d’été aux épais traits verticaux et aux gouttes qui rebondissent sur le sol en formant des V :

L’ombrelle protège même de la neige, comme l’illustrent Utagawa Kunisada I (Toyokuni III), Utagawa Toyohiro ou Kikukawa Eizan :



Kawase Hasui, l’un des maîtres du renouveau pictural shin-hanga au XXe siècle, aime à ponctuer d’ombrelles déployées ses paysages de temples enneigés :




Et il peut même servir de parachute dans cette charmante scène de Harunobu, où une jeune femme saute du haut de la terrasse du temple Kiyomizu :

Motif de kimono
Enfin wasaga constitue un motif très graphique.
On le retrouve sur ce katagami (pochoir) du XIXe siècle :

Et sur ce somptueux uchikake (manteau) d’Utagawa Kuniyoshi :

Il s’agit précisément de janome-gasa (蛇の目傘, « ombrelle en œil de serpent »), avec des anneaux concentriques, des ombrelles plus légères généralement utilisées par les femmes.
C’est également ce motif qui décore le papier washi de mes cartes buissonnières :

Sources :
« Tout savoir sur l’ombrelle japonaise »